À partir de quel moment, un groupe a-t-il atteint sa maturité?
À partir de quel moment, le groupe est dans la phase de « performing » selon Tuckman?
La maturité d’un groupe concerne l’équilibre entre les 3 énergies nécessaires à sa croissance. L’énergie de production, de solidarité et d’entretien.
La maturité n’est jamais gagnée. Il se peut qu’un groupe atteigne des résultats très rapidement en mobilisant toutes ses ressources, puis vive des périodes de troubles. Dans ce sens, la maturité du groupe aborde également la croissance du groupe vu que certains des signes apparaissent durant celle-ci.
Le contenu qui suit provient de l’ouvrage de Yves St-Arnaud Les petits groupes Participation et Animation. La forme a été modifiée pour vous offrir une expérience de lecture particulière.
Quels critères observer pour évaluer un groupe de travail?
Différents critères seront utilisés pour juger la maturité d’un groupe. Face à une telle thématique, il est difficile de pouvoir tout aborder, il faut donc faire des choix. Mais un terme revient souvent: la coopération.
Lorsque les membres sont capables de coopérer ensemble, alors le système-groupe est mature. Mais qu’est-ce qui permet à la coopération d’émerger?
1) Priorité à la cible commune
On peut constater la maturité lorsque les individus d’un même groupe restent concentrés sur une cible à la fois. Cela demande donc de mettre de côté les objectifs individuels. Souvent, les membres doivent s’approprier la cible. Le praticien en charge peut chercher à changer de niveau logique pour réussir à définir une cible commune, comme le préconise Dominique Bériot dans son ouvrage « Manager par l’approche systémique ».
Si l’objectif de Jacques est d’écrire un livre pour arrêter de fumer, mais que l’objectif de Cécile est de créer un livre sur la diététique… et que Marcel veut publier une nouvelle méthode sportive, le leader pourra leur demander: pour obtenir quoi cherchez-vous à « répéter l’objectif de chacun » Attention à ne pas utiliser la forme « pourquoi » qui pousse à la justification (et donc au présent), mais plutôt à le séparer. Pour + obtenir + quoi?
De cette manière, on pousse les gens à se tourner vers le futur et à changer de niveaux logiques. Dans ce cas, Cécile, Jacques et Marcel arriveraient peut-être à définir la cible commune suivante: créer un ouvrage permettant aux gens de se prendre en main pour aller mieux.
Ce travail permet aux membres d’un groupe de définir une cible commune.
[thrive_text_block color= »green » headline= » »]Ce travail lié à la production est intimement lié à celui de solidarité. On fait plus facilement des concessions lorsque l’on éprouve de la sympathie envers nos coéquipiers. À l’inverse, si on éprouve des tensions face à certains membres d’un groupe, on ne cherchera pas à coopérer.[/thrive_text_block]
Selon Dominique Anzieu et Jacques-Yves Martin, un « but » (cible commune) est composé de 3 caractéristiques. La pertinence (avec l’objectif long terme, la raison d’être du groupe), la clarté (fonder sur des faits plutôt que des opinions) qui permet d’être facilement compris par tous les participants et l’acceptation (choisi par le groupe, ses membres et en concordance plus ou moins grande avec les intérêts personnels de chaque individu). On remarque que certains éléments du modèle SMART sont là.
2) Respect des compétences de chacun
Si chaque membre reconnait l’importance de la présence des autres pour la réussite de l’objectif, alors le groupe montre du respect envers lui-même.
Il est important de réunir les bonnes personnes, et une fois celles-ci réunies, d’exprimer régulièrement pour quelles raisons ces personnes travaillent ensemble.
Ce respect mutuel pousse à l’écoute. On écoute les gens parce qu’ils disposent d’un savoir que l’on n’a pas. Un savoir technique, une certaine intelligence sociale, etc.
La compétence couvre tout « ce qui confère à une personne le droit et la possibilité de juger et de décider en certaines matières ». Cela touche donc les processus de production, de solidarité et d’entretien.
Naturellement, les cibles varient dans la vie d’un groupe. Par exemple pour mettre en place un système de management au sein d’une entreprise (objectif long terme) différents jalons seront à atteindre (objectifs court/moyen terme).
Ces objectifs intermédiaires peuvent concerner les ressources humaines, la sécurité, la formation, les finances, la stratégie, etc.
Donc à certains moments, un membre disposant beaucoup de connaissance en ressources humaines en aura moins lorsqu’il s’agira d’aborder la sécurité ou la stratégie (par exemple). Durant cette phase il adoptera un profil plutôt bas sur la production, mais pourra fournir plus d’effort sur l’entretien ou la solidarité.
Un membre demeure souvent compétent pour le processus de solidarité et d’entretien.
La maturité d’un groupe peut s’observer lorsque les membres prennent en considération les avis des autres membres et n’ont pas peur des conflits. Au contraire, ils arrivent à résoudre les divergences et les conflits.
3) Le partage du pouvoir dans la prise de décision.
Le groupe doit pouvoir partager son pouvoir et le répartir entre les membres du groupe. Il n’est pas nécessaire d’obtenir à chaque décision un consensus, car même dans des groupes qui fonctionnent bien, il est difficile de toujours y parvenir. Plus important que le consensus, c’est la capacité au groupe de choisir un mode de prise de décision qui convienne à tout le monde. C’est aussi pour cette raison que je suis persuadé que le véritable leadership se trouve réparti dans le groupe plutôt qu’auprès d’un seul individu.
[thrive_text_block color= »dark » headline= » »]Souvent, lorsqu’il s’agit de prendre une décision, on oublie que la première décision à prendre est de définir comment on souhaite prendre la décision.[/thrive_text_block]
Quel mode utiliser ?
Voici 4 types de décisions. Nous les aborderons plus en détail dans un prochain article.
L’unanimité, la décision à la majorité, la délégation et la décision par consensus.
Une fois le mode choisi, la procédure suit les étapes suivantes: la définition de la cible commune sur laquelle la décision porte. La collecte d’opinions, la délibération et pour terminer la décision.
Souvenez-vous: dans un groupe qui fait preuve de maturité, la responsabilité est partagée.
Maturité individuelle & maturité du groupe
Est-il nécessaire que le groupe soit composé d’individus matures pour réussir à atteindre la maturité au niveau de groupe?
Non.
La maturité du groupe se penche sur le fonctionnement du groupe, plutôt que l’individu. Mais il va de soi que des membres matures faciliteront l’arrivée de la maturité au niveau du groupe.
En exigeant que les membres d’un groupe soient matures, on se retrouverait rapidement dans une impasse. On chercherait rapidement un coupable, on mettrait la faute sur certains individus et la solidarité en pâtirait.
La personnalité d’un individu doit être prise en compte en amont, mais une fois le groupe créé, il est important de composer avec et d’être dans une optique systémique.
[thrive_text_block color= »orange » headline= » »]Dans le modèle du groupe optimal, on accepte les gens tels qu’ils sont.[/thrive_text_block]
Cela n’exclut pas le respect des normes minimales qui exigent ou bannissent certains comportements pour assurer le fonctionnement du groupe.
Dans le modèle du groupe optimal proposé par Yves St-Arnaud, on part du principe que les limites personnelles peuvent être tolérées, car on fait confiance au processus d’entretien. À ce titre, un animateur peut veiller à ce que les limites personnelles ne mettent pas en péril les autres processus.
Tout comme un système humanitaire est plus efficace lorsqu’il est régulièrement en contact d’agresseur externe. Un groupe qui accepte les moments difficiles et s’y confronte fait preuve de plus de maturité qu’un groupe qui cherche à les éviter à tout prix.
Comment évaluer la maturité d’un groupe en pleine action?
Par ce que c’est bien sympa ce que vous venez de lire, mais peut-être qu’un outil plus concret vous serait utile?
Des recherches menées à l’Université de Sherbrooke ont permis de créer un questionnaire qui évalue la maturité d’un groupe à partir de renseignements collectés après une réunion. C’est un outil qu’un animateur ou intervenant peut utiliser pour aider le groupe à atteindre sa maturité.
Le degré de maturité dans un groupe: Questionnaire et piste de solutions
[one_third_first]Questions[/one_third_first][one_third]Critères[/one_third][one_third_last]Commentaires[/one_third_last]
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[one_third_first]A-t-on réussi à mettre les intérêts de chacun en commun?[/one_third_first][one_third]Priorité à la cible commune & Respect des compétences de chacun[/one_third][one_third_last]Si la réponse est non, le processus de production et les autres sont déficients. La priorité à la cible commune (nécessaire la naissance d’un groupe) n’est pas présente. Si la réponse est oui, alors les deux critères sont respectés[/one_third_last]
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[one_third_first]Est-on d’accord sur ce que l’on veut accomplir? [/one_third_first][one_third]Partage du pouvoir de décision[/one_third][one_third_last]Si la réponse est positive, les trois processus ont été intégré. C’est un indice indirect lié au partage du pouvoir dans les décisions. Si ce n’est pas le cas, du travail est à fournir dans le processus d’entretien.[/one_third_last]
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[one_third_first]Parle-t-on de la même chose? [/one_third_first][one_third]Priorité à la cible commune[/one_third][one_third_last]Si la réponse est non, des obstacles se situent dans la production. Et on doit intervenir avec de l’énergie d’entretien. Si la réponse est oui, alors l’énergie dans le processus de production est suffisante ou alors le processus d’entretien est efficace pour lever les différents obstacles.[/one_third_last]
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[one_third_first]A-t-on perdu de vue ce qu’on souhaitait effectuer? [/one_third_first][one_third]Priorité à la cible commune[/one_third][one_third_last]Si la réponse est oui, la faiblesse du processus de production n’est pas compensée par le processus d’entretien.[/one_third_last]
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[one_third_first]Des membres sont-ils laissés de côté?[/one_third_first][one_third]Respect de chacun et partage du pouvoir de décision[/one_third][one_third_last]Si c’est le cas, le groupe se prive d’une quantité d’énergie groupale et l’énergie résiduelle augmente. Si la réponse non, tout baigne.[/one_third_last]
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[one_third_first]Qui prend les décisions dans le groupe?[/one_third_first][one_third]Partage du pouvoir et respect des compétences[/one_third][one_third_last]Si l’ensemble du groupe y participe, la maturité est présente. Si une personne décide ou alors un sous-groupe, cela donne un indice sur les lacunes par rapport aux critères ci-contre.[/one_third_last]
Mot de la fin à propos de la maturité d’un groupe
La maturité d’un groupe fait penser à une étape claire et nette à franchir. En réalité, le groupe se trouve entre la croissance et la maturité bien plus souvent que ce que l’on ne le pense. Cela demande du temps et comme le disait Tuckman, dès qu’un nouvel individu intègre le groupe, le processus recommence.
Ce n’est pas parce que les individus d’un groupe se disent satisfaits qu’ils le sont réellement. On fera donc une grande différence entre les faits et les dires. Un outil permet donc aisément de sentir si on se dirige vers la maturité ou pas.
C’est le tableau du degré de maturité qui se base sur 3 critères essentiels: la priorité à la cible commune, le respect de chacun et le partage du pouvoir dans les décisions.
J’espère que vous vous approprierez cette tabelle pour évaluer vos groupes.
Merci pour votre attention.